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Santé
Grippe : y a-t-il encore suffisamment de vaccins dans notre région ?5min
Par Rémy Reponty13/12/2025 à 07:03
L'épidémie s'intensifie mais les stocks de vaccins baissent cruellement quand la campagne de vaccination n'est pas encore terminée. Entretien avec le président du Conseil régional de l'ordre des pharmaciens en Provence-Alpes-Côte d'Azur et Corse.
Alors que l'épidémie de grippe s'intensifie partout en France et que le nombre de passages aux urgences pour grippe a doublé en une semaine dans notre région (source ARS Paca), les pharmaciens doivent faire face à des stocks de vaccins en forte baisse. Cela s'explique très probablement parce que la vaccination contre la grippe a augmenté de 20% cette année. Une conséquence de la forte grippe de l'an dernier, d'où une prise de conscience plus forte sur l'importance de se faire vacciner. Alors, y aura-t-il suffisamment de vaccins jusqu'au 31 janvier, date de fin de la campagne de vaccination ?
Les réponses de Stéphane Pichon, président du Conseil régional de l'ordre des pharmaciens en Provence-Alpes-Côte d'Azur et Corse, dans cette vidéo.
(Interview, images et montage : Rémy Reponty pour Maritima Médias.)
Chaque hiver, la grippe saisonnière touche de 2 à 6 millions de personnes en France, provoque plusieurs milliers d’hospitalisations et entraîne 10 000 décès, principalement chez les personnes de 65 ans et plus (source ARS Paca).
Maritima : Vous en êtes où de vos stocks de vaccins contre la grippe ?
Stéphane Pichon : Écoutez, pour la profession, les stocks sont très tendus en ce moment. C'est-à-dire qu'on est obligé de se dépanner entre confrères, quand il y a certains confrères qui n'en ont plus et d'autres qui en ont encore. Parce que, c'est vrai qu'il y a eu une augmentation de presque de 20 % de la demande de vaccination cette année. La grippe a été terrible l'année dernière, les gens s'en sont rendu compte, et donc ils ont plus sollicité la vaccination antigrippale cette année. Ça veut dire une augmentation de 20 % de prélèvements sur les stocks et les confrères qui n'ont pas pu prévoir cette augmentation se retrouvent sans vaccins antigrippaux. Aujourd'hui, on se dépanne les uns les autres par différents moyens entre nous.
Mais, il s'avère qu'il y a aussi un stock d'État d'à peu près 1 million de vaccins et ce stock d'État doit être libéré. Parce que le vaccin grippal c'est du "one-shot", c'est-à-dire qu'il n'est valable que pour 2024-2025. L'année prochaine, il ne sera plus valable. C'est-à-dire qu'aujourd'hui il n'y a aucune raison de ne pas libérer ce stock d'État. On est en décembre, la campagne s'arrête fin janvier et on a vraiment besoin de vacciner les gens. Sachant que la campagne de vaccination grippale commence en octobre.
D'ailleurs, le conseil que je pourrais donner pour les prochaines années, c'est : vaccinez-vous dès que la campagne commence ! Ça ne sert à rien d'être vacciné contre la grippe au mois de juin et d'être protégé au mois de juillet. Le vaccin antigrippe protège entre huit et douze mois. Donc, commençons avant que l'hiver arrive, avant que les épidémies ne progressent.
Sachez que, à Marseille, par exemple, quand un TGV arrive d'une région qui a été, on va dire, contaminée par la grippe, il y a plus de 1000 personnes dans un TGV et ça contamine 10 000 à 20 000 personnes une fois qu'elles ont été en contact à Marseille. Donc, c'est tout de suite, dès que vous recevez votre bon de vaccination, faites-le et vous serez protégé pendant tout l'hiver.
Est-on à la veille d'une pénurie de vaccins ?
Écoutez, on arrive déjà en fin de campagne parce qu'on a prolongé la campagne jusqu'à fin janvier. On pourrait être en pénurie de vaccins, c'est pour ça qu'il faut s'y prendre le plus tôt possible. Après, quoi qu'il arrive, si tout le monde est vacciné et a utilisé les stocks de vaccins qui sont disponibles sur notre territoire, on peut alors se faire éventuellement dépanner par d'autres États.
Il y a des États qui ont beaucoup commandé. Alors, l'Agence européenne du médicament peut permettre aux États de se dépanner les uns des autres sur une grosse épidémie grippale. Mais, sachez que plus on se vaccine, plus vite on est protégé et moins le virus circule entre les gens. Donc, aujourd'hui, une fois qu'on aura libéré le stock d'État et qu'on aura utilisé tous les vaccins sur le territoire, on n'aura plus de vaccins.
Mais j'espère que nous serons arrivés à la fin janvier et que toutes les personnes fragiles, surtout, seront vaccinées. Parce qu'une grippe, ça tue ! Ça fait des milliers de morts par an, sur une grippe. Une grippe, ce n'est pas une grippette comme on a tendance à le dire dans le Sud. On attend trop longtemps, qu'il fasse froid chez nous, justement parce qu'on a l'impression qu'on est protégé. Mais un virus, ça ne varie pas avec la température et les conséquences de la grippe sont des pneumopathies sévères, des hospitalisations… même chez des jeunes. Alors, il faut vraiment se protéger. On a la chance d'avoir un vaccin qui protège, profitons-en.
Voyez-vous une augmentation forte des cas en ce moment ?
Il y en a eu, il y a quinze jours, trois semaines et même jusqu'à la semaine dernière. On a la chance de pouvoir faire, dans les officines de pharmacie de toute la région, des tests qu'on appelle des tests "combo" qui font la différenciation entre le covid et la grippe. Et, on a vu des cas de grippe effectivement, et des personnes qui étaient fatiguées, courbaturées, avec tous les symptômes d'une vraie grippe. Je voudrais dire qu'une vraie grippe c'est au lit pendant toute une semaine. Ce n'est pas juste le nez qui coule, ça c'est un rhume.
Finalement, êtes-vous inquiet ou vous arrivez encore à gérer ?
Non, on arrive à gérer parce qu'on arrive à anticiper. Et, de toute façon, on a une solidarité professionnelle qui fait qu'on se dépannera les uns les autres. C'est-à-dire que moi, par exemple, dans ma pharmacie, une fois que toute ma population cible a été vaccinée, avec les vaccins que j'ai en plus, je vais pouvoir dépanner des pharmaciens et des confrères. C'est ainsi que ça se passe en général.
C'est vrai qu'à un moment donné, on arrivera à ce qu'il n'y ait plus rien. Il aurait fallu être prévoyant et se faire vacciner le plus tôt possible. Bien sûr, quand on a 18 ans, 20 ans, 30 ans, on est moins sensible que lorsqu'on dépasse les 55, 65 ans et que là on a des pathologies en plus connexes qui font qu'on a besoin d'être vacciné. L'avantage, c'est qu'aujourd'hui le pharmacien qui va vous vacciner va vous mettre à jour peut-être d'autres vaccinations : diphtérie, tétanos, coqueluche, polio. On s'aperçoit lors de la vaccination grippale que des gens ne sont pas vaccinés depuis 20 ou 30 ans contre des pathologies qu'on peut éviter. Un tétanos, ça peut être mortel ! Donc, profitez-en pour vous mettre à jour, pour en parler avec votre médecin. On est plusieurs professionnels de santé à pouvoir vous vacciner (médecins, infirmiers et pharmaciens, NDLR). Il faut "faire feu de tout bois" dans les maladies que l'on peut prévenir et qu'on peut éviter.
Ce serait dommage d'avoir des produits, des vaccins, qui nous permettent d'éviter des pathologies graves et qu'on n'en profite pas.
Pour en revenir à la grippe, même quand on n'est pas dans la population cible, pour protéger les plus faibles, c'est bien aussi de se faire vacciner ?
Pour protéger les plus faibles, oui, mais pour vous protéger vous, aussi ! Parce que, regardez, vous êtes journaliste, vous êtes en pleine activité, vous êtes performant et demain vous avez une grippe. C'est une semaine au lit, voire dix jours et presque dix jours encore pour s'en remettre. Alors, ce n'est même pas le problème de ne pas aller travailler, mais c'est d'être fatigué. C'est-à-dire que ça fait mal, une vraie grippe ça fait mal ! Et, pour peu qu'on ait un petit problème, qu'on soit fragilisé, on peut être hospitalisé et quel que soit son âge. Par conséquent, arrivé à un certain moment, on se protège, ça ne coûte rien, ça prend même pas dix minutes dans une pharmacie et vous repartez, vous êtes protégé. Au bout de quinze jours pratiquement, vous êtes protégé pour la saison. Je pense que ça vaut le coup.
Pour terminer, le Covid, où en est-on ?
Le Covid, en tant que tel, il y a de moins en moins de cas. Ça c'est peut-être dû à une forte vaccination. Il y a beaucoup de personnes assez âgées qui sont vaccinées. Beaucoup de gens ont été vaccinés et donc le Covid circule beaucoup moins et il est beaucoup moins nocif, on va dire, qu'il a pu l'être en 2020, par exemple, où il y avait des morts.
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