C’est un 8 mai qui restera dans l’histoire martégale. Et sans doute, pour de longues années encore, dans les cœurs du peuple algérien présent dans la commune. Ce jeudi, une stèle a été inaugurée au cimetière de Réveilla à la mémoire des Algériens massacrés dans la région de Constantine, entre le 8 mai et le 26 juin 1945.

Le maire Gaby Charroux était présent pour déposer une gerbe et prononcer un discours devant une soixantaine de personnes. « C’est un moment important, attendu, et hautement symbolique que nous vivons aujourd’hui, autour de cet arbre », a-t-il déclaré. Il a poursuivi : « Avec la Ville de Martigues, nous n’oublierons pas ces familles endeuillées, qui n’ont jamais eu droit à la justice, ni ces morts restés dans le silence », avant de conclure : « Chaque année, ce temps de mémoire fera partie de notre calendrier républicain. »

 

Une mémoire encore trop peu enseignée

 

Les massacres dans le Constantinois ont duré un mois et 18 jours, du 8 mai au 26 juin 1945, touchant principalement les villes de Sétif, Guelma et Kherrata. Tout serait parti, selon plusieurs sources historiques, d’un drapeau algérien brandi par un jeune scout de 26 ans, Bouzid Saâl, pendant les célébrations de la Libération par les colons français. Ce geste, alors interdit, aurait déclenché des affrontements sanglants : des milliers d’Algériens furent tués, ainsi qu’une centaine de Français.

Salah Bougris, d’origine algérienne, était présent à la cérémonie : « Je suis là pour ma famille, mon entourage, qui a vécu ces moments difficiles. Ce qu’a fait le maire, c’est pour se souvenir, mais aussi pour aller de l’avant et construire l’avenir. »

Sabrina Kerrouzi, le drapeau algérien autour du cou et vêtue d’un blazer vert, témoigne : « C’est une période qu’on ne nous enseigne pas à l’école, alors qu’elle est importante. Mes parents l’ont vécue comme un traumatisme. J’ai visité cette région d’Algérie, et les gens là-bas sont encore très marqués. Moi, je n’ai pas de rancune. C’est juste un moment d’histoire dont il faut parler, et se souvenir. »

 

Fraternité entre deux peuples

 

Entre la sonnerie aux morts, la minute de silence et la Marseillaise, un dépôt de gerbes a été effectué devant la stèle, sur laquelle est gravée : « La Ville de Martigues se souvient… À la mémoire des victimes des massacres dans le Constantinois algérien. »

À notre micro, Yamine Aouir, responsable du Collectif Rebel 13 et de Martégalité, s’exprime avec émotion : « Je suis né à Martigues, j’ai grandi ici, j’y ai fait toute ma vie, et j’en suis fier. Mais j’ai aussi des origines algériennes que je ne veux pas oublier. On est ici pour la fraternité entre le peuple français et le peuple algérien, et je remercie la Ville de Martigues. Ma mère était à Sétif. Elle était loin des massacres, mais elle vivait avec une pression quotidienne. Je suis reconnaissant. »

La cérémonie s’est conclue par l’hymne algérien, Kassaman, repris par plusieurs dizaines de participants rassemblés autour de la stèle. Un moment de recueillement, de fraternité et, surtout, de mémoire pour rappeler un pan souvent oublié de l’histoire, survenu pendant l’occupation française de l’Algérie, qui dura 132 ans, de 1830 à 1962.

 

 

Les massacres de Constantine, l’autre 8 mai 1945.

 

Retrouvez ici notre reportage sur la commémoration à Martigues de la Libération de la France occupée par l'Allemagne nazie.